Le vieil alchimiste lève la tête alors que la porte s’ouvre. Il caresse un moment sa fine barbe blanche pendant à son menton avant qu’un léger rire quitte ces lèvres desséchées. Il n’a pas besoin de parler tout comme il n’a pas besoin de poser la question fatidique. Il sait parfaitement qu’il s’agit de moi sans que je ne prononce le moindre mot alors que je prenais place devant lui. Est-ce que je devais le mettre sur le fait qu’il était un ancien shinobi trop vieux pour poursuivre des missions ? Ou plus simplement parce que ce vieil aveugle avait des sens défiant ma très jeune imagination ? A vrai dire, j’espérais parfois qu’il me mette sur la voie. Qu’il me laisse entendre que je trainais cette odeur de mort et de sang. De trahison et de mensonge.

Cela serait plus spectaculaire et amusant que le vague silence qu’il laissait à chaque fois planer entre nous. Sans un mot, l’alchimiste c’était levé, parcourant l’espace qui le séparait de la cache secrète où m’attendaient plusieurs rouleaux. Dans le même cérémoniel, il me les présenta un à un sans le moindre geste brusque et disparut dans l’arrière boutique faire du thé. Une habitude que nous avions prise depuis plusieurs années. Il était l’une des rares personnes à ne jamais me poser de question, à ne jamais se montrer curieux ou à vouloir décrypter le moindre de mes gestes. Une chose que j’appréciais chez un vieux Shinobi…A moins qu’il ne le fasse sans rien en montrer. Ce que j’appréciais d’autant plus. La jeune génération avait du mal à conserver une attitude plus froide.

Je fis sauter les cachets des premiers rouleaux. Résultats de mission pour la plupart, beaucoup de rumeur à éclaircir, quelques informations glanées qu’il me fallait méditer et remettre dans un contexte plus large. Mais plus globalement rien qui attirait définitivement mon attention. Redistribuer les tâches serait mon principal souci pour aujourd’hui. Je défis mon sac pour en sortir du papier et de l’encre quand le vieil homme revint avec le thé. Il en servit deux tasses avec une dextérité étonnante.

‘‘J’ai appris une nouvelle bien étrange hier’’ Je levais un œil circonspect, reprenant mes travaux d’écriture.

‘‘Rien que je ne sache déjà’’

‘‘Le médecin chef de notre hopital menace de partir. Les patients deviennent instables et parlent d’une menace imminente…De malédiction ’’

Je roulais le papier avant de le cacheter. En temps ordinaire, j’aurais simplement dit qu’il s’agissait d’une affaire de prêtre. Du moins, si cette information était venue d’un autre. Pas que j’avais le respect des aînés mais si une personne qui avait survécu autant de temps m’en parlait directement. Le moins que je pouvais faire était d’y consacrer quelques minutes. Une malédiction cachait parfois quelque chose de plus pragmatique. Après tout, j’étais le premier à les utiliser pour faire fuir les curieux. Y avait il une histoire particulière derrière cet hôpital ? A moins qu’il ne s’agisse des prémisses d’une attaque de Youkaï sur le territoire ? De toute manière, vu les tendances agressives d’Araki, la perte d’un bon médecin risquait de gêner plus d’un plan.

N’ayant rien à faire pour le moment, ce ne serait définitivement pas une mauvaise chose de m’en occuper personnellement. Bien que j’espérais que cela n’avait rien à voir avec les récentes attaques de Yokaï…Je me levais, laissant le manuscrit scellé devant le vieil homme qui saurait quoi en faire. Le temps d’aller chercher un déguisement plus adéquat d’un jeune moine et de cacher mes armes et un masque sur moi, je pris le chemin de l’hôpital en question.

Peut être que la paranoïa était mal placée cette fois ci. Peut être que non mais à en croire le médecin, on ne pouvait rien contre cette malédiction. A voir la folie qui transpirait de l’homme, j’avais du mal à croire que quelqu’un versait autant de sang gratuitement. Ce qui tendait à me faire croire à une véritable malédiction…D’un autre côté, que plusieurs prêtres soient venus, purifiés l’endroit plusieurs fois me plongeait dans un état dubitatif. Soit cela n’avait rien de surnaturel, soit les prêtres étaient vraiment incompétents.

Cependant, qu’autant de prêtre et de prêtresse échouent aussi lamentablement pouvait avoir d’autres significations. Il pouvait s’agir d’un mal trop puissant pour eux ou encore d’une chose échappant à leur compréhension. Dans ce cas, pourquoi cela ne se manifestait que maintenant ? Quel était la raison de tout cela ? En tout cas, il m’apparaissait évidant qu’on ne pouvait pas traiter cette histoire par des voies normales. Il me fallait plus d’information et pour cela, je n’avais plus qu’à revenir dans le village.

//Direction la taverne pour trouver une personne expérimenté sur les malédictions//

Je poussais le shoji de la taverne puis le fermait derrière moi. J’espérais tomber sur les rumeurs habituelles pour en apprendre plus sur ce qui pouvait s’être passé récemment. Trouver un point de départ à cette histoire. Le déclencheur. Une cause peut être. Je m’installais tranquillement ouvrant mes oreilles. Peut être qu’avec un peu de chance je tomberais sur un voyageur qui était déjà tombé sur ce genre d’histoire.

Je regardais d’un air distrait les joyeux buveurs, le plus idiots à leur tête en me demandant ce que j’allais pouvoir faire d’eux. Je n’avais rien contre les gens qui savaient s’amuser. Par ailleurs, je préférais les voir imbibés que comploter des mauvais coups ou s’en prendre à leurs compatriotes. C’étaient des idiots, certes, mais il n’y avait pas de quoi décoller leurs têtes de leurs épaules. L’espace d’un instant, je me demandais si cela ne vaudrait peut être pas le coup de briser le bras de mon interlocuteur histoire de le rendre plus loquace. C’était fou ce qu’un peu de douleur pouvait aider parfois dans la vie.

Cependant, je n’étais pas persuadé que cet homme savait quelque chose d’intéressant. En fait, je doutais fortement qu’il ce soit intéressé à autre chose qu’a la qualité des alcools dans les auberges qu’il a croisé. Tout au plus, il aurait entendu parler de quelque chose mais sans y prêter attention. Ce qui voulait très certainement dire que même s’il avait rencontré un cas similaire, il ne devait pas savoir comment le traiter pour autant. En d’autre terme, on appelait cela une perte de temps et je ne risquais pas de griller ma couverture pour un crétin. Je n’étais pas samurai…Ma fierté n’était pas continuellement en jeu. J’allais me lever quand quelque chose attira mon attention dans ces paroles. Pas du genre à écouter les ragots ? Alors pourquoi savait-il que j’avais vu le vieux médecin ? Et s’il n’écoutait pas les ragots, comment savait il qu’il était hanté ?

Je me retins sur le moment d’aller lui exploser le nez sur la table…Le constat serait le même très certainement. Tout au plus, il pourrait au plus me dire ce qu’il a entendu. Ce qui restait a priori des ragots d’alcoolique au vu du personnage. Je pouvais arriver au même résultat en allant simplement m’expliquer avec une femme et sans que j’ai à griller ma couverture. Je regrettais sur le moment de pas être allé au marché…Cependant, là aussi j’aurais eu le sentiment de perdre mon temps a écouter ce qui avait été déjà utilisé. Ce n’était pas comme si j’avais des connaissances poussés en malédiction.

//Aller parler à une femme, c’est ma seule piste et du coup mon dernier mot JP//

Apparemment, la patience avait cela de bon qu’elle pouvait être récompensé de la manière la plus inattendue. Je ne m’attendais pas à ce que la jeune fille me soit aussi utile et piquer autant ma curiosité. Je me doutais qu’il y avait bien une présence dans l’hôpital. Une présence que j’aurais pu chasser en vain sans qu’elle se révèle à moi. A moins qu’elle ne prenne ma présence pour une provocation et là, cela se réglerait dans le sang. Ce n’était pas une solution qui me déplaisait en soit…Seulement je n’étais pas certain que l’hopital puisse tenir le coup de notre confrontation ce qui provoquerait certainement quelques morts parmi les patients. Voir pire, le docteur.

Je soupirais en jouant du bout du doigt avec un mochi, considérant le temps par la fenêtre…

La présence d’un vieil homme dans la ville pourrait être un élément déterminant. Ou j’aurais pu encore perdre mon temps en essayant de chercher une solution plus subtile. Même si j’étais persuadé qu’il n’existait pas de coïncidence et que cet homme avait quelque chose à voir avec cette histoire d’une manière ou d’une autre. Je pris les mochi qui je plaçais dans une besace. Toujours utile pour en faire offrande au cas où.

// Je vais voir le Vieil Homme //

Des pas vagabonds dans une ville que je connaissais que trop bien. Pourtant mes yeux semblaient la découvrir pour la première fois. Alors que je n’avais rien d’autre à faire que d’attendre, une évidence s’imposait lentement à mon esprit. Petit à petit, les détails m’apparurent…La façon dont un commerçant ouvrait son restaurant. Celle d’un jeune garçon qui aidait son parent à allumer une lanterne.

Etait ce étrange si j’avouais qu’en cet instant il me semblait voir pour la première fois ? D’aussi loin que je pouvais me souvenir, je ne me rappelais pas avoir simplement flâné dans les rues sans aucune raison particulière. On avait inculqué à mes sens d’être toujours sur le qui vive. D’être à l’affut de la moindre information intéressante qui pouvait me servir. De connaitre les cachettes potentielles.

Une chape de soie c’était soulevée et je m’émerveillais des petits riens qui rendaient cette ville plus vivante que cette grande étendue de bâtiments anonymes que je m’étais évertué à voir toute ma vie. Au loin, une lumière sacrée attira mon attention. Plus haut, le ciel était dégagé…Pas le moindre nuage au point que la lune et les étoiles me donnaient le vertige. Est-ce que j’avais vraiment vu un éclair ? Peut être un enfant qui s’entrainait dans la montagne ? Un futur guerrier ?

Mentalement, je notais qu’il faudrait envoyer quelqu’un pour enquêter sur cette histoire.

Une légère distraction qui venait de me couter un Môchi. Je soupirais, bien ennuyé de m’être laissé prendre par surprise. Si cet homme avait été armé, il était certain que j’aurais eu une lame planté dans le ventre ou le dos. Mais était ce vraiment ma distraction qui m’avait perdu ? Je ne l’avais pas vraiment entendu arriver et sa main m’avait parut…Etrange.

Mais peut être me cherchais je une excuse après tout. Je décidais de laisser cela de côté, après tout si cela pouvait lui faire plaisir. Ce n’était qu’un vieux fou et probablement celui qui effrayait le quartier. De nuit, cela pouvait certainement s’expliquer. Je haussais les épaules en me dirigeant dans la direction que l’homme m’indiquait…

//Pourquoi pas, après tout t'en avais déjà mangé là-bas, et tu remarques son doigt pointé vers l'ouest, dans les champs à l'extérieur des fortifications //